A Nice, l’Abbaye de Roseland dans le giron de l’association PaysSages

CPM06 18 février 2020 0
©Philippe JOSEPH

Fin 2019, l’Abbaye de Roseland ouvrait spécialement ses portes au Club de la Presse 06 sous l’égide du paysagiste Michel Péna, concepteur de la Promenade du Paillon (lauréate des Victoires du Paysage 2014). Objectif : présenter la future Fondation PaysSages sur le site même de l’Abbaye, fief de la première Ecole de Nice (Yves Klein, Arman, Ben…), mais demeurée sans vie depuis une quarantaine d’années et qui pourrait bien cette fois retrouver ses lettres de noblesse.

©Philippe JOSEPH

Avec la ville comme lieu de prédilection, ce fils de ferrailleur bordelais, formé à l’architecture et diplômé en 1983 de l’E.N.S.P.*a réalisé plus de trente hectares d’espaces verts sur Paris comme Le Jardin Atlantique sur la gare Montparnasse (1987) – l’un des tout-premiers jardins artificiels de la capitale – et nombre d’espaces verts à l’étranger comme le Parc des Paysages à Moscou… Depuis quelques années, Michel Péna se consacre surtout à son rôle de conseil auprès des villes en misant sur l’intégration urbaine : « Il faut arrêter de bétonner et créer un milieu vivant en synergie en en harmonie avec la culture des hommes… J’approfondis à Nice l’idée de la Ville fertile que nous avons portée à Paris avec l’exposition de 2011 à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine : marier la poésie et la science, la nature et la culture, arrêter de se morfondre sur la catastrophe écologique pour ramener la planète sur la voie de la vie ! ». Validée par le maire qui a convaincu d’anciens champions de sports mécaniques d’y apporter leur notoriété, soutenue par deux figures médiatiques – Stéphane Bern et Stéphane Marie -, la future Fondation a vu rentrer dans son comité de parrainage l’ancien ministre Jean-Jacques Aillagon, le philosophe Edgar Morin, et la directrice de l’Institut Ecologie et environnement du CNRS, Stéphanie Thiebault.

Pourquoi le choix de l’Abbaye de Roseland ?
Plus précisément, la Fondation PaysSages articule son projet autour de cinq principaux thèmes de travail : Sciences et arts, convergences et connexions avec le monde de l’entreprise, paysages du changement climatique, accompagnement des territoires démunis, et promotion de la ville fertile. A deux kilomètres à l’ouest du noyau urbain original, sur un immense terrain en pente douce, tout de forêt, d’anciennes plantations et de vestiges lapidaires, aujourd’hui rendu à l’état sauvage et donnant sur la baie des Anges, l’Abbaye de Roseland (qui a cédé son nom et aussi une partie de son terrain à une large résidence des années soixante-dix sans n’avoir jamais été une véritable abbaye) est apparue à Michel Péna comme le site idéal. Concrètement, la Fondation devrait donner le jour à un conservatoire de plantes et arbres endémiques, un musée dont une large partie à ciel ouvert, un centre de formation, ainsi qu’un lieu d’échanges sur les deux étages de l’ancienne maison florentine du 17è s. Déjà dotée de six personnes, l’association de préfiguration se trouve pour l’heure en recherche de financement pour transformer ses ambitions en programmation. A suivre.

Josselyne Bélieu.
*Ecole Nationale Supérieure du Paysage
https://www.facebook.com/payssages.org/

L’Abbaye de Roseland, une abbaye de fantaisie !
A l’origine, Roseland était l’une de ces  « maisons des champs » que les grandes familles niçoises faisaient construire aux 17è et 18è s. hors de l’agglomération urbaine (actuel Vieux-Nice). Au décès de Jean-Ange Dalmassi, seigneur de Faraon, en 1763, elle devient la propriété de l’une des branches de la plus illustre famille noble du Comté de Nice, les Lascaris-Vintimille, comtes de Castellar. Ils émigrent en 1792 et leurs biens sont confisqués jusqu’en 1815 lorsque la propriété est rachetée par la famille Jaume, puis ensuite par le comte Apraxine, grand mélomane russe (qui offre une école au quartier). En fait, l’essentiel de son aspect actuel reviendra à Edouard Larcade à partir de 1925. Cet antiquaire parisien renommé et  originaire du sud-ouest, va incorporer à l’extérieur comme à l’intérieur de nombreux éléments médiévaux originaux, créant un curieux mélange avec les décors en trompe-l’œil du milieu du 19è. Il y ajoute un cloître à vingt-six colonnes des 5è et 6è s. provenant de la Daurade, un édifice religieux toulousain majeur, et une chapelle, puis d’autres colonnes gothiques issues du cloître de Bonnefont en Comminges… En 1961, le fils Larcade, propriétaire d’une galerie parisienne d’avant-garde, y organise le premier Festival des Nouveaux Réalistes regroupant entre autres Arman, Yves Klein…. Quant aux jardins, ils sont le produit de l’architecte-paysagiste picard Octave Godard, déjà auteur de ceux  de la Villa Bellanda à Cimiez et des Grands Cèdres à Fabron (visibles depuis la voie rapide). De 1923 à 1927, il conçoit pour Roseland un jardin composite alliant géométrie à la française, allées et pelouses ponctuées de roseraies, notes italiennes à travers le mobilier de marbre blanc contrastant avec les sinuosités à l’anglaise menant au cloître qui domine la villa… Les essences méditerranéennes (chêne vert, olivier, caroubier, pin d’Alep, cyprès, genêt…) voisinent avec une végétation exotique variée (arbre de Judée, néflier du Japon, pittospore de Chine, eucalyptus, palmier des Canaries et nains, cocculus laurifolins, figuier de Barbarie, aloès, agaves…). Tout un patrimoine qui attend de renaître.  

Commenter »

You must be logged in to post a comment.